27 novembre 2006

L'industrie musicale veut allonger ses droits d'auteurs

L'industrie du disque en France en avait fait un objectif pour 2006. Les grandes maisons de disques, au nom soit-disant des artistes interprètes, fait monter la pression pour réduire le champ du domaine public en allongeant les droits en Europe.

En principe, le droit d'auteur doit trouver l'équilibre entre deux préoccupations majeures de la société. Il doit tout d'abord encourager à la création, en assurant aux créateurs la possibilité de continuer à créer en tirant des revenus suffisants de leurs précédentes créations. Il doit ensuite favoriser l'accès du public aux oeuvres créées par les autres membres de la société. Comme le brevet, le droit d'auteur est un contrat entre le public et le créateur, où chaque partie a ses devoirs, et ses obligations.

Parmi les devoirs des créateurs figure celui de laisser librement l'accès aux oeuvres et leur exploitation après une période donnée. La durée du droit d'auteur, qui était de quelques années seulement après la création de l'oeuvre lorsque ce "contrat" est apparu au XVIIIe siècle, n'a cessé de s'allonger. Il est aujourd'hui de 70 ans post-mortem, c'est-à-dire qu'il faut attendre 70 années après la mort d'un auteur pour voir ses oeuvres enfin passer dans le domaine public. Mais il n'y a pas que l'auteur dans le droit d'auteur. Lorsque l'enregistrement a fait son apparition à la fin du XIXème siècle, les artistes-interprètes qui jouent les oeuvres ou les chantent en vue d'être enregistrées sur un support ont eux-aussi exigé d'avoir des droits. Tout comme, bien sûr, les producteurs des phonogrammes (musique) et de vidéogrammes (cinéma). Pour ne pas les confondre avec le droit d'auteur, on parle alors de "droits voisins".

Ces droits sont plus courts que ceux accordés aux auteurs. Ils sont en France de 50 ans après la première publication de l'oeuvre. On considère que celui qui n'est pas à l'origine de l'oeuvre, mais qui n'a fait que l'interpréter ou la fixer sur un support destiné au commerce dispose d'une fenêtre d'un demi-siècle pendant laquelle il peut tirer des subsides de cet effort. L'industrie du disque et du cinéma, qui repose essentiellement sur ces droits voisins, a beaucoup poussé pour que ses droits soient étendus au delà des 50 ans prévus dans le traité WPPT de l'OMPI. Ils ont obtenu gain de cause dans un certain nombre de pays : Etats-Unis (95 à 120 ans), Mexique (75 ans), Chili (70 ans), Brésil (70 ans), Pérou (70 ans), Turquie (70 ans), Inde (60 ans), Venezuela (60 ans)...

L'exception culturelle européenne

Mais pas en Europe. Le SNEP (Syndicat National de l'Edition Phonographique), en France, avait fait de cette question de l'allongement des droits l'une de ses priorités pour 2006. La difficulté des débats sur DADVSI l'a sans doute incitée à attendre avant de porter cette nouvelle estocade aux droits du public sur les oeuvres. Dans son argumentaire public, le SNEP peine à trouver des motifs convaincants à cet allongement. Il met en exergue le nombre d'oeuvres appelées à passer dans le domaine public dans les prochaines années (sur les vingt prochaines années, 47 000 enregistrements tomberont dans le domaine public et concerneront 2 589 artistes différents), et veut faire croire que l'exploitation des vieilleries sert à financer les nouveautés. Le bon vieux chantage aux nouveaux talents n'a pas évolué depuis le siècle dernier. Il note, par exemple, que Johnny Hallyday commencera à perdre ses droits en 2011, avec 16 oeuvres qu'il a enregistrées et pour lesquelles il ne percevra plus de droits. Pas plus que la maison de disques qui les a produites et distribuées.

De façon assez comique, le SNEP (qui rappelons-le représente les maisons de disques et non les artistes) publie même une lettre ouverte d'artistes-interprètes suppliant l'Europe de faire un geste. La lettre a pour principal argumentaire la nécessité pour l'Europe de s'aligner sur la tendance mondiale à l'allongement. Et le SNEP publie cette lettre ouverte alors que les signatures des artistes-interprètes ne sont pas encore récoltées ! Ca en dit long sur la méthode...

EMI veut protéger ses Beatles

Outre-Manche, c'est le président de la major EMI qui dégaine. Dans un séminaire privé à Downing Street, Eric Nicoli s'est inquièté cette semaine des positions que pourraient prendre le gouvernement britannique. Celui-ci a commandé un rapport à Andrew Gowers, l'ancien directeur du Financial Times, et selon les rumeurs il ne se serait pas laissé convaincre par les arguments des maisons de disques. "Les vues de ceux qui s'opposent au concept de la protection du droit d'auteur semblent davantage résonner dans le Gouvernement que celles de ceux qui créent les oeuvres", s'offusque M. Nicoli. Depuis quand les maisons de disques ne passent plus avant le public dans les priorités gouvernementales ?

Sans doute depuis qu'internet a fait prendre conscience à beaucoup que le contrat que nous évoquions au début de cet article est aujourd'hui totalement déséquilibré. Et il est pourtant sans doute du meilleur intérêt des maisons de diques et de la culture que les droits voisins ne soient pas allongés.

Les maisons de disques se reposent sur les droits voisins pour sortir un nouveau remix des oeuvres des Beatles et en matraquer la promotion, plutôt que pour promouvoir les nouvelles oeuvres de leurs talents vivants, tels Paul McCartney. L'allongement du droit voisin c'est l'allongement du droit à ne rien faire de neuf. Et au nom de quoi l'industrie culturelle serait-elle la seule à pouvoir vivre sans innover ? Si les brevets sont limités à une durée de 20 ans, c'est bien pour assurer une innovation continue et pour permettre au public de profiter librement des innovations précédentes. La meilleur chose qui puisse arriver à l'industrie du disque serait de ne plus pouvoir se reposer sur des cadavres, et d'être contrainte à avancer.

merci Ratatium

20 novembre 2006

Les anti-DRM remercient Microsoft

C'est un beau cadeau fait par Microsoft à toute la communauté opposée aux systèmes de protection imposés sur les oeuvres numériques. Avec le Zune, Microsoft permet au débat sur les DRM de trouver sa résonance chez le grand public, qui jusque là n'y comprenait pas grand chose...

On pensait que la réaction viendrait des premiers acheteurs de l'iPod, ceux qui ont succombé aux charmes de Steve Jobs et de sa boutique de musique en ligne iTunes. On pensait que ces consommateurs des premières heures réaliseraient tôt ou tard qu'une chanson qu'ils achètent sur iTunes ne peut pas être lue sur un autre baladeur que l'iPod. On pensait, naïvement, que c'est en achetant un baladeur d'une autre marque que la réaction viendrait. On se disait, convaincus par nous-mêmes, qu'il n'était pas possible que l'iPod garde sa suprématie et qu'enfin le jour viendrait où le grand public réaliserait pourquoi il faut refuser d'acheter de la musique avec DRM.

Mais c'était sans compter sur le talent de lobbying de Microsoft. C'était sans compter sur l'aptitude de Microsoft à démontrer au monde entier pourquoi il faut fuire ses propres produits. C'était sans compter sur le Zune.

En mai 2004, Microsoft lance une nouvelle version de son DRM Windows Media, avec le nom de code Janus (dieu romain à une tête mais deux visages opposés, gardien des passages et des croisements, nous dit Wikipedia). Il s'agit entre autres d'assurer une portabilité vers les baladeurs des chansons louées sur les plate-formes de musique en ligne. Plus tard, la norme trouvera un nom plus marketing et très prometteur : PlaysForSure. Pour contrer Apple qui s'est enfermé dans le shéma iTunes+iPod en se gardant l'exclusivité des deux systèmes, Microsoft veut convaincre toutes les plate-formes concurrentes d'adopter son DRM PlaysForSure. Les fournisseurs de musique sont priés de vendre du WMA protégé à la norme PlaysForSure et les fabricants de baladeurs priés de gérer le format. Mais malgré les efforts des deux camps, la sauce ne prend pas. Apple garde 85 % du marché du baladeur, et iTunes reste de loin la plate-forme où se vend le plus de musique en ligne.

Microsoft incompatible avec Microsoft : la magie du Zune

Dépité, Microsoft tente alors une nouvelle carte. Il va imiter la stratégie d'Apple et proposer un baladeur et une plate-forme de musique en ligne étroitement liés dans un même écosystème. C'est ainsi que naissent le Zune et son Zune Marketplace. Toute la presse s'en fait l'écho et anticipe très largement depuis cet été la sortie du concurrent de l'iPod et d'iTunes. On le devine, les chansons vendues sur le Zune Marketplace ne seront lisibles que sur un baladeur Zune. Mais alors que toutes les attentions se portent sur les limitations absurdes apportées à la fonction phare de partage de chansons par Wi-Fi, c'est une autre limitation qui pourrait couler la stratégie de Microsoft. Pas seulement la nouvelle, mais aussi l'ancienne.

Car tous les consommateurs qui ont cru au marketing de "PlaysForSure" (joue la musique à coup sûr) viennent de découvrir la dure réalité des DRM. Les morceaux qu'ils ont acheté sur les plate-formes PlaysForSure à base de technologie Microsoft ne peuvent pas être lus sur le baladeur Zune créé et commercialisé par le même Microsoft. Le géant de Redmond a tellement voulu imiter la stratégie d'Apple qu'il a volontairement omis de rendre son baladeur MP3 compatible avec les plate-formes de ses clients. Ces dernières, déjà convaincues de l'inutilité des DRM, se rebellent enfin. On a vu en France la Fnac et VirginMega commencer à commercialiser des fichiers MP3 sans DRM. Et surtout les consommateurs eux-mêmes réalisent grâce à Microsoft les dangers du système qu'il a lui-même imposé. Le New York Times consacre cette semaine un article au problème des DRM, un article qui n'aurait trouvé que peu d'écho chez les consommateurs dans un shéma dominé par Apple d'un côté et par une multitude d'offres PlaysForSure de l'autre.

Ils se seront fait avoir une fois, mais sans doute pas deux. Ils savent que s'ils avaient piraté des chansons en MP3 plutôt que de les acheter avec DRM, ils n'auraient eu aucun problème pour les transférer sur le Zune. Demain, ils se pencheront éventuellement sur les plate-formes de plus en plus nombreuses qui proposent l'achat de chansons en MP3, sans DRM. Mais même ça n'est plus certain...

merci Ratatium

Zune vs Vista

Triste nouvelle pour tous les fans de Microsoft, qui achètent tous leurs nouveaux produits à la sortie (si, si, je suis sûr qu'ils existent). D'après ZD Net, les équipes développant le Zune (l'iPod des amis de Bill Gates) et celles qui s'occupent de Windows Vista (le remplaçant d'XP) ont oublié de travailler ensemble. Résultat, les deux produits sont incompatibles, alors que leur sortie aux Etats-Unis n'est espacée que de quinze jours. Microsoft a annoncé travailler d'ores et déjà d'arrache-pied pour régler le problème d'ici la sortie de Vista, mais une bourde comme ça fait tâche au moment du lancement de deux produits aussi importants.
On est bien sûr tenté de faire du MS-bashing, et de rappeler toutes les bonnes raisons de ne choisir ni Zune ni Vista. Cependant sur le secteur du lecteur mp3, le rapport de force traditionnel entre Apple et Microsoft est inversé, et le Zune pourrait bien être l'outsider qui viendrait bousculer un peu le marché au profit du consommateur (même si ZD Net encore nous explique toutes les raisons pour lesquelles ils n'y croient pas).

Merci Fluctuat

17 novembre 2006

Coltrane+Getz = unique

Stan getz et John Coltrane jouant ensemble en 1960, vraiment incroyable... Cliquez ici pour la vidéo

Myspace innove

MySpace a sorti un nouveau concept de concerts interactifs. Les internautes qui regardent un concert à distance chez eux peuvent se brancher sur le système MySpace Live et envoyer en direct des messages au groupe et aux spectateurs. La première expérience sera tentée ce week-end, où pendant le concert de Paul Oakenfold à Miami, un écran diffusera les messages envoyés par les utilisateurs de MySpace qui profitent du concert à des milliers de kilomètres. Une déclinaison, appelée "Hey, Play This", permet en plus aux internautes de demander au groupe, pendant le concert, de jouer certaines chansons.
Le principe a déjà été tenté notamment par ColdPlay et les Rolling Stones... mais avec des SMS que seuls les spectateurs présents dans la salle pouvaient lire. Le concept de MySpace permet d'établir une communication avec les spectateurs qui ne sont pas physiquement présents.

Merci Ratatium

16 novembre 2006

Agent d'artistes creative commons



C'est un nouveau venu sur la scène artistique française. Une nouvelle profession : agent d'artistes créateurs d'oeuvres libres. CreativePeers est né avec l'envie de faire de la liberté un principe qui n'est pas incompatible avec la rémunération de l'auteur...

Christophe Gontier est montpellierin. Ancien élève de l'EPITA, prestigieuse école d'informatique parisienne, il est avant tout passionné par la musique et comprend très tôt que "l'avenir est à la liberté et non aux restrictions". Ca ne l'empêche pas, bien au contraire, de travailler sur un projet d'entreprise qui aura pour but de permettre aux artistes de trouver une rémunération autrement que dans la simple vente de leur musique ou de leurs créations aux particuliers.

C'est ainsi qu'après un an et demi de développement, il fonde CreativePeers avec une multitude d'idées pour assurer un modèle économique viable à son entreprise et aux artistes. Il pense d'abord aux médias traditionnels, pour qui diffuser de la musique, des films ou de l'information gratuitement n'est pas un problème. Tous se servent des oeuvres pour attirer l'attention sur un contenu plutôt qu'un autre, et il doit être possible d'imaginer le même shéma sur Internet, sans nécessairement en passer par la publicité.

L'idée première de CreativePeers, c'est de servir de "caisse de dépôt" aux auteurs qui veulent certifier être les créateurs d'une oeuvre licenciée en Creative Commons. Il est en effet très facile pour un internaute peu scrupuleux de prendre une oeuvre protégée par le régime légal du droit d'auteur et d'y apposer en toute illégalité une licence Creative Commons. CreativePeers, pour assurer la sécurité juridique des exploitants d'oeuvres sous licences CC, certifie que l'oeuvre est bien attachée à un auteur dont l'identité a été relevée, et propose alors aux professionnels, éditeurs ou commerçants, d'exploiter les oeuvres dont les droits d'utilisation commerciale ont été réservés (c'est le cas classique des oeuvres sous licence Creative Commons by-nc-sa, utilisée notamment par Ratiatum).

Le matériel pour financer l'immatériel

En se glissant dans le costume d'agent artistique, CreativePeers se rémunère alors grâce à des commissions sur les ventes de catalogues. Le site prend par exemple 30 % pour toute exécution publique d'une oeuvre, en discothèque, en bar, ou chez un commerçant inscrit au registre du commerce. Il se réserve ensuite 18 % lorsqu'un contrat est négocié pour l'exploitation d'une oeuvre sur un support commercial enregistré. Les tarifs dépendant du type d'oeuvre, de leur durée, mais aussi d'un système original de points octroyés par les internautes. Plus une oeuvre a de points, plus elle est vendue chère. Pour attribuer un point, l'internaute doit envoyer un SMS dont le coût facturé est lui-même partagé avec l'auteur. Il est aussi possible d'acheter des packs de points, dont 70 % du prix est reversé aux auteurs.

De plus, CreativePeers propose à ses auteurs de monter une boutique en ligne où ils proposent chacun des produits de leur création. Ouvert à toutes les formes d'arts, le site propose par exemple les reproductions numériques des tableaux de l'artiste-peintre Bass, en Creative Commons, mais aussi à la vente des T-shirts confectionnés par l'artiste et même des tables gigognes. Pas question d'imiter eBay, puisque seuls des productions artisanales créées par le vendeur sont acceptées.

Le site n'est pas non plus ouvert à tout le monde. "Je ne suis pas YouTube", explique Christophe Gontier qui veut avant tout "croire en l'artiste pour pouvoir le défendre". Il s'adresse en particulier aux artistes qui vivent déjà de leur art mais cherchent de nouvelles façon de communiquer leurs oeuvres, en particulier à travers les licences Creative Commons...

Enfin, précisons que les oeuvres sont téléchargeables en P2P avec le protocole Dijjer mis au point par Ian Clarke, l'inventeur du célèbre réseau Freenet et de Ravver.

Merci Ratatium

15 novembre 2006

Universal et Microsoft réinventent la rémunération pour copie privée

Qu’on ne s’y trompe pas, c’est bien là que se situe un des enjeux majeurs de la « nouvelle économie » de la musique : la rémunération pour copie privée. C’est elle que sont en train de réinventer Microsoft et la maison de disques Universal Music, qui vient de signer avec le premier un accord prévoyant qu’elle percevra une dîme sur les ventes de baladeurs Zune.

Si un tel accord avait été signé avec Apple, avec qui Universal Music dit désormais vouloir renégocier la nature de ses engagements, les ventes de iPod auraient déjà rapporté plusieurs centaines de millions de dollars aux maisons de disques. Mais elles n’ont certainement pas été assez clairvoyantes pour discerner que l’essentiel de la valeur créée par le développement de la musique en ligne allait se concentrer dans un premier temps sur le hardware.

Au point de bouleverser de fond en comble le modèle de business d’Apple, dont le iPod représente aujourd’hui plus de 30 % des revenus et dont toute la stratégie se tourne désormais vers le secteur des loisirs numériques.

Pourquoi la copie privée représente-t-elle un tel enjeu ? Parce partout où l’industrie des contenus aura de plus en plus de mal à faire respecter ses droits de propriété intellectuelle, du fait de l’évolution technologique et des nouveaux usages qui se développent grâce aux mobiles et à Internet, c’est le régime de la copie privée qui s’appliquera. Avec si possible, une rémunération à la clé.

Quand on sait qu’il ne s’est vendu que 20 titres de musique sur iTunes Music Store par baladeur iPod acheté, on ne doute plus un instant que la copie privée a été et sera le moteur de la nouvelle économie de cette industrie.

Une remise en cause de la gestion collective

Dans la plupart des pays européens, la copie privée est autorisée dans un cadre privée par une exception au droit d’autoriser des producteurs et donne lieu à la perception d’une compensation directe sur les ventes de tous les appareils d’enregistrement et supports de stockage. Gérée en France par la Sorecop (Société de perception et de répartition de la rémunération pour la copie privée), cette compensation fait l’objet d’une gestion collective, dans un cadre réglementaire fixé une bonne fois pour toutes par la loi Lang de 1985.

C’est toute la différence avec ce que préfigure l’accord passé entre Microsoft et Universal, qui introduit une gestion contractuelle de la copie privée. Ce n’est plus la loi mais le marché qui régule à la fois ses modalités et les conditions de sa rémunération. Il s’agit purement et simplement de « marchandiser » cet espace privé et de le contrôler, soit via les DRM, soit par le biais de « contrats » de ce type.

Derrière les efforts de certains géants de l’électronique grand public comme Philips ou Nokia pour remettre en cause le principe de la rémunération pour copie privée en Europe, l’objectif est le même : laisser le marché réguler la copie privée au mieux de ses intérêts. Pour eux comme pour les majors de la musique, tout ce qui relève d’une gestion collective, y compris les droits d’auteurs, doit désormais s’ouvrir à la concurrence.

Ce serait se priver, en même temps, de tout un pan du financement de la politique culturelle des Etats, en matière de subvention de la création, notamment. Et d’une partie des moyens qui permettent de mener une politique culturelle et de défendre des exceptions dans ce domaine. Faut-il tout abandonner aux marchés ? Ce sera l’un des enjeux des réformes de la propriété intellectuelle en Europe dans les années à venir.

Une chose est sûre, plutôt que sur le négoce de la valeur intrinsèque de ses contenus, l’industrie culturelle devra dorénavant compter sur trois sources de revenus : la publicité, les services et… la copie privée. Les majors feront tout pour que cette dernière échappe au contrôle des sociétés de gestion collective en Europe.

Philippe Astor

14 novembre 2006

Interview Steve Reich

Au milieu des années 70, alors que le divorce entre public et «musique contemporaine» semble irrémédiable, deux compositeurs américains, Philip Glass et Steve Reich, créent un bouleversement majeur avec des oeuvres «répétitives». Formé par Berio à la technique sérielle, Reich vit rapidement les limites d'une musique refusant mélodie, harmonie, centre, pulsation et rythme. Sa participation à une exécution d' In C de Terry Riley, pionnier du minimalisme, sera une révélation, au même titre que les improvisations modales de John Coltrane, dont il a vu plus de cinquante concerts.Avec sa première pièce, It's Gonna Rain, en 1965, Steve Reich explore les effets de phase entre deux bandes magnétiques sur lesquelles il a enregistré la voix d'un prêcheur noir, et redécouvre l'efficacité d'une forme très ancienne : le canon. Il applique cette trouvaille à l'écriture pour deux pianos, puis quatre orgues, effectue des voyages au Ghana et à Bali, et, en 1976, avec les scintillants contrepoints de Music for 18 Musicians, il fait littéralement sensation.
Depuis, l'Américain a livré un nombre important de chefs-d'oeuvre, dont Eight Lines, Tehilim, The Desert Music, Different Trains et City Life, qui lui valent d'être considéré par certains comme le plus grand compositeur vivant. Ce que confirme le planning de sa tournée mondiale, entreprise en janvier à l'occasion de ses 70 ans, qui fait largement étape en France (lire encadré ci-contre).
De Tehilim, en 1981, à You Are, il y a deux ans, vous composez de plus en plus souvent à partir de textes.
Ils me contraignent à des choses que je ne ferais pas sans cela. Avant de mettre en musique la première phrase de You Are, j'ai passé six mois à la traduire dans différentes langues, à essayer des découpages prosodiques. La phrase complète dit : «Tu es là où sont tes pensées», elle est signée Rabbi Nahman de Breslev, chef spirituel hassidique des années 1810. On peut être assis dans une pièce ; mais si l'esprit vagabonde ailleurs, c'est là qu'on se trouve. Quand on écoute de la musique, on est entraîné dans une autre dimension, définie par les harmonies qu'on entend. Cette section de l'oeuvre a un spectre harmonique large, du très consonant au très dissonant. La deuxième phrase vient des Psaumes de David : Shiviti hashem l'negdi, et signifie : «Je place Dieu devant moi.» L'idée, cette fois, c'est que, si l'esprit peut vagabonder, on peut aussi lui donner une direction. J'utilise ensuite une phrase de Wittgenstein : «Les explications finissent par trouver leur limite», qui traduit bien le fait que chaque époque relativise les découvertes scientifiques de la précédente. De fait, You Are semble commencer comme Desert Music, mais, avec l'entrée des quatre pianos, la scène harmonique change.
Quelle a été la genèse de votre pièce Daniel Variations ?
Le père de Daniel Pearl m'a demandé une pièce pour la fondation qu'il a créée afin de promouvoir l'échange et l'amitié entre les peuples. J'ai été impressionné par cet homme. Si on avait égorgé mon fils, je ne pense pas que j'aurais eu sa grandeur d'âme. Il m'a appris que Daniel jouait du violon jazz, blue-grass, et s'en était souvent servi en reportage pour entrer en contact avec les gens. J'ai relu le «Livre de Daniel» dans la Bible, qui se passe cinq cents ans avant J.-C., lorsque Nabuchodonosor, roi de Babylonie, l'Irak actuel, détruisit le temple de Jérusalem et contraignit les juifs à l'exil. Le roi a un rêve apocalyptique et demande à Daniel de l'interpréter. J'ai repensé à la vidéo de Daniel Pearl, à ce qu'ils l'ont obligé à dire : «Mon nom est Daniel Pearl, je suis un juif américain d'Encino, Californie.» Dans un livre laissé par Daniel, on trouve cette phrase : «I Hope Gabriel likes my music.» Un ami lui avait demandé : «Que se passera-t-il après ta mort ?» Et c'est ce qu'il lui avait répondu : «J'espère que Gabriel aimera ma musique.» C'était le titre d'une chanson de 1936 du violoniste de jazz noir Stuff Smith. Dans le mysticisme juif, quand un rêve va affecter la vie de millions de gens, l'ange Gabriel est toujours là.
Comment voyez-vous l'avenir de la musique ?
Le compositeur David Lang m'a dit que j'avais eu de la chance de naître en 1936. Au milieu du siècle, la musique a commencé à devenir si complexe et à produire des résultats si horribles, que les gens s'en sont détournés. A la fin du Moyen Age, le contrepoint atteignait aussi un niveau de sophistication proche de l'impasse, puis Monteverdi est apparu. Bach lui-même, mon compositeur favori, ne marque que l'apogée d'un style. Son fils lui dit : «Ta musique est sublime mais on en a marre», et Haydn arrive avec une musique plus simple. Après Wagner, on pensait que la musique ne pouvait plus être que chromatique, mais Debussy dit : «Pourquoi n'essaierait-on pas des tons pleins ?» Ce que Riley, Glass et moi avons fait, quelqu'un d'autre l'aurait fait. Il ne faut pas penser la musique avec des principes. Ni Bach ni Mozart ne marquent de rupture historique, ce qui ne retire rien à leur génie. Pour moi, toute la musique microtonale peut aller à la poubelle. Pourtant, je viens d'entendre Decasia, la dernière pièce de Michael Gordon, et elle est microtonale. Je dirais même que c'est la première qui mérite d'être entendue.
Merci Libé

13 novembre 2006

Ludwig est dans la place

Voici une merveilleuse appli en flash développé pour le site de Keeping Score, une émission de musique classique de la chaîne américaine PBS. Un joli soft qui vous propose d'entrer dans l'univers historique et musical de la 3e symphonie de Ludwig Von Beethoven, l'Héroïque. A gauche, le replacement historique et les références aux campagnes et généraux de Napoleon, qui inspira la fameuse symphonie. A droite, la partition jouée en streaming, et quelques clics qui révèlent, à nos yeux esbaudis, le thème, les clés et les corrections apportées au texte mélodique. Le tout est par ici.

10 novembre 2006

L'eau comme surface de controle

Aujourd'hui c'est musique et bidouille. Sebastian Tomczak est un musicien/programmeur/hacker Australien. Il a mis au point une surface de controle de 8$ à partir d'un pointeur laser, un cellule photoelectrique et un bol d'eau. C'est vraiment incroyable les sons qu'il sort de ce système, par moment ça ressemble à certaines oeuvres de Ligeti.




09 novembre 2006

Jean-Pierre François - Je te survivrai

Certains se sont étonnés de mon expression "riaa je te survivrai" dans mon dernier post. Comment ça, vous ne connaissez pas Jean Pierre François ? THE ONE and ONLY ???
"De la pure daube comme on les aime" dixit un commentaire... jugez par vous même :

"Dans les miroirs chinois, Dans le bleu des photos Dans le regard d'un chat Dans les ailes d'un oiseau Dans la force d'un arbre Dans la couleur de l'eau Je te survivrai Dans l'hiver et le vent
Dans le froid des maisons Dans les sables mouvants Où j'écrirai ton nom Dans la fièvre et le sang
Dans les murs des prisons Je te survivrai"

Textes et musique Didier Barbelivien (après on s'étonne qu'il vote sarkozy)

Grace à youtube (qui devrait être classé patrimoine de l'humanité) je peux combler cette lacune :


08 novembre 2006

Les dessous du deal entre Youtube/ Google


Le rachat de Youtube par Google cache-t-il des manoeuvres peu reluisantes qui ont abouti à gruger et les artistes et le marché ? C’est ce qu’affirme sous couvert d’anonymat un vétéran des nouveaux médias plutôt bien informé. Le pire, c’est que ce qu’il avance est très plausible.

L'article complet ici

07 novembre 2006

RIAA je te survivrai

Affaire Santengelo, deuxième. Incapables de poursuivre la mère de famille Patricia Santengelo, le lobby américain du disque a décidé d'attaquer ses enfants. La RIAA veut y gagner du respect mais pourrait surtout s'attiser encore un peu plus les foudres du public.

L'affaire de Patti Santagelo contre la RIAA a déjà fait le tour du monde et a bien sûr déjà été couverte sur Ratiatum. Mère de cinq enfants, Patricia Santengelo a été poursuivie par l'Association des majors du disque, comme plus de 20.000 autres individus aux Etats-Unis. Mais contrairement à l'immense majorité d'entre eux, Mrs Pantagelo a décidé de se battre et de ne pas céder au célèbre chantage exercé par la RIAA : signer un chèque d'accord à l'amiable amiable et enterrer le procès, ou payer encore plus cher de frais de procédure uniquement pour se défendre devant un tribunal.

"Je n'ai rien fait de mal, pourquoi devrai-je les payer ?", s'offusquait la quadragénaire il y a déjà plus d'un an. Elle n'a jamais utilisé Kazaa, et ne savait même pas qu'un tel logiciel existait avant de recevoir une mise en demeure signée des avocats de la RIAA. Depuis, Patricia Santagelo a couru les médias pour plaider sa cause et surtout pour dénoncer les méthodes du lobby derrière lequel se cachent en particulier les quatres majors de l'industrie du disque : EMI, Warner, Sony BMG et Universal Music.

Elle a réussi à convaincre de sa bonne foi - jamais elle n'a touché à un logiciel de partage de fichiers et elle n'a donc jamais téléchargé la moindre chanson. Et voilà que l'on apprend par la presse que, mercredi, la RIAA aurait déposer de nouvelles plaintes, cette fois contre la fille et l'un des fils de l'accusée. L'organisation indiquerait au tribunal que Michelle, 20 ans, aurait reconnu avoir téléchargé des chansons depuis l'ordinateur familial, et que son frère Robert, 16 ans, aurait été compromis par les déclarations de l'un de ses (ex ?) meilleurs amis.

Opération de communication

Problème, l'avocat de Michelle Santengelo, Jordan Glass, n'a pas souvenir que sa cliente ait reconnu le moindre téléchargement lors de son audition. Il était bien sûr présent. Autre problème : la RIAA semble avoir averti la presse très tôt alors que les avocats attendent toujours la confirmation qu'une plainte a bel et bien été déposée la semaine dernière.

L'opération de communication livrée par la RIAA ressemble à du lynchage, à de l'acharnement, et pourrait être contre-productive pour le lobby de l'industrie du disque. Déjà cette année l'organisation a reculé plusieurs fois pour abandonner certaines procédures, face à un manque évident de preuves. Mais le cas des Santengelo est plus délicat pour la RIAA. C'est un peu "sa parole contre la mienne", et à ce jeu le lobby n'a pas l'intention de perdre. Il fera tout ce qu'il peut pour faire fléchir la famille new-yorkaise. C'est devenu une question de principe, où tous les coups seront permis.

Mais le mot final reste dans le porte-feuilles des consommateurs américains. Combien de temps encore avant qu'ils réalisent que c'est en achetant des disques Universal, Warner, Sony BMG ou EMI qu'ils financent et encouragent de telles actions ? Le boycott initié dès les premières plaintes gagne un nombre croissant d'amateurs de musique, et un acharnement d'une telle nature ne peut que l'alimenter toujours davantage...

Merci Ratatium

03 novembre 2006

Roni size : la suite

02 novembre 2006

Roni Size : Brown paper bag

Que du bon qui a quelques années mais je ne m'en lasse pas ...
Découvert sur You Tube, of course !




Et pour ceux qui en veulent plus :

Roni Size (born Ryan Williams, 29 October 1969, in Bristol, England), is a drum and bass DJ and producer. He came to national prominence in 1997 as the founder and leader of Reprazent, a drum and bass collective. That year they won the Mercury Prize for their album, New Forms.

Size grew up in the Bristol suburb of St. Andrews and cites reggae as one of his early influences. Size was expelled from school at the age of 16 and started attending house parties run by Bristol mavericks the Wild Bunch (later Massive Attack). He learned the basics about music production down at his local youth club before setting up his own home studio.

His future musical partner, Krust, enjoyed an early dalliance with fame as part of the Fresh 4, whose "Wishing On A Star" reached the Top Ten of the UK Singles Chart in late 1989. After meeting up with Krust, Suv and Die they founded Full Cycle Records as an outlet for their innovative sounds.

Size was keen to describe the mélange of influences as intuitive: "If Krust walks into the studio and his head is nodding, that's enough. I know I've got a result there. He doesn't need to touch a button or tell us what he thinks, 'cos we already know what he's thinking."

Much of the acclaim centred around Size's melding of the new with the old - the propulsive jungle beats accompanied by live drums and double bass. The band - Size (compositions/programming), DJ Krust, Onallee (vocals), Dynamite MC and rapper Bahamadia (a former protégé of Gang Starr) - came together on Bristol's highly fertile and disparate club scene. As a result, Reprazent's sleek, highly musical take on drum 'n' bass is equally informed by hip-hop, funk, soul and house.

In consolidation of their mainstream breakthrough (the most significant for jungle (music) since Goldie's debut), Reprazent set out to become the summer sound of 1997 with a series of festival appearances (including Tribal Gathering).

Size subsequently teamed up with DJ Die and Leonie Laws in Breakbeat Era, before returning to Reprazent to record the second album, October 2000's uncompromising In The Mode, which included guest vocals from Zach de la Rocha of Rage Against the Machine and Method Man of Wu-Tang Clan.